Présentation de l'éditeur :
« En prenant des chemins quelque peu buissonniers, par exemple voir quelle place les écrivains donnent aux faits-divers, aux délices et aux affres de l’attente, à la tentation de l’inachevé, aux rapports entre vie privée et écriture, à la façon d’écrire l’amour, ces essais adoptent tout naturellement la revendication de Baudelaire sur le droit de se contredire. Et ils aboutissent à deux questions : Qu’est-ce qu’écrire ? Écrire est-il une raison de vivre ? L’une et l’autre, on s’en doute, ne peuvent que rester sans réponse.»Angelo RINALDI, mon maître à critiquer, si j'ose dire, concluait ainsi son commentaire sur le roman Le veilleur de Roger GRENIER : « En comptable des pas perdus. En virtuose des filtres et des ellipses. En écrivain qui toujours sut en trois phrases donner l'impression de la durée, capter le flot amer du temps, dont son oeuvre, en sa grisaille sans miséricorde, reproduit le mouvement de ressac, chaque livre ayant poussé l'autre, comme les vagues. »
C'était il y a dix ans, mais je crois que ce passage s'applique tout aussi bien au recueil de courts essais réunis dans Le palais des livres que nous offre maintenant Roger GRENIER.
Un des charmes de ce livre est qu'il nous donne l'impression à la fois de pénétrer dans une bibliothèque ou une libraire (mais pas un de ces souks où les livres sont offerts comme friperie dans un décrochez-moi-ça). Tout y est, cette odeur caractéristique des livres, cette ambiance recueillie, cette idée que le passé n'est pas tout à fait mort, qui nourrit le présent, ce sentiment d'être chez soi.
Pourquoi écrire, en effet : « L'écriture est-elle une raison de vivre ? [...] Comment [le besoin d'écrire] nous vient-il et comment s'enracine-t-il ? Et nous voici conversant avec SARTRE, CAMUS, LARBAUD, JAMES, SCOTT FITZGERALD, TCHEKHOV et tant d'autres. On en vient à se demander si « connaître la vie privée d'un auteur est important pour comprendre son oeuvre. » L'écrivain n'aspire-t-il pas à « être à la fois invisible et présent, tout dire sur soi-même sans en avoir l'air » ? L'époque, on le sait, depuis le succès de ce genre appelé « autofiction » apprécie l'exhibition de soi. Ce que l'auteur tient pour « la lie de ce qu'on trouve sur les étals des librairies ». Pourtant, qu'y a-t-il de plus intime que l'amour, par ailleurs éternel sujet d'inspiration littéraire ? La mémoire, l'enfance, comment « cela » se fait-il ? On écrit pour être aimé. Mais il faut publier, ce qui n'est pas la même chose. Un jour viendra où l'on signera la dernière œuvre, mais, l'écrivant, le sait-on ? A-t-on encore quelque chose à dire ? quelles sont les vertus de l'inachèvement ?
Voilà autant de corridors où il fait bon, dans ce palais, se perdre tout en cheminant de conserve avec GRENIER et les auteurs qu'il évoque; pour moi, j'ai entrepris le livre par le milieu, avec l'article « Une demi-heure chez le dentiste » sur la nouvelle. Je vous conseille d'en faire autant. Sachez cependant que la contagion vous guette : d'un auteur à l'autre, d'un livre à l'autre, à lire et à relire, quel attrait trouverez-vous encore au monde ?
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