vendredi 27 novembre 2009
L'homme de cinq heures - bis
De la déception, je passai à l'agacement. Tomberai-je dans l'irritation ?
Je ne sourcille plus qu'à peine devant les « il entra et sortit de la pièce », solécisme semble-t-il passé dans l'usage, mais je ne puis accepter le si anglais, si administratif « et/ou » : « ... des rideaux jaune et/ou bleu qui devaient avoir été découpés dans un drapeau confédéré de la guerre de Sécession. » Encore qu'on voit mal d'où vient le jaune, les drapeaux successifs des États confédérés ayant été bleu, blanc et rouge, l'usage du pluriel ou du singulier aurait marqué la nuance que suggère l'auteur, des rideaux ayant du jaune et du bleu, ou étant à la fois jaune et bleu.
Détails, certes. Purisme ? je ne crois pas. Sinon, à quoi bon la grammaire ?
Et toujours des adjectifs, des adverbes...
Encore un exemple d'un sujet qui a mal tourné !
mercredi 25 novembre 2009
L'homme de cinq heures
Gilles HEURÉ, L'homme de cinq heures, Viviane Hamy, Paris, 2009 (286 pages).
Encore une fois, je suis déçu, pourtant les critiques étaient bonnes, et j'aime les romans sur les écrivains, les livres, la littérature. Que d'adjectifs, que d'adverbes, quelle prose convenue. Las. J'y reviendrai une fois le livre terminé.
lundi 23 novembre 2009
L'homme de cinq heures
Avant de me lancer dans ma relecture de MODIANO, ce roman vivement recommandé par la critique.
Présentation de l'éditeur
« Le fleuve tirait languissamment les dernières lueurs de cette fin d'après-midi d'automne et, là-haut, les nuages se livraient à d'étranges joutes avec le vent capricieux. Paul Béhaine songea à des tableaux impressionnistes, saluant mentalement l'Apollinaire, jadis flâneur des deux rives. L'esprit libre, il ne prêta attention au personnage qui s'approcha de lui que quand il entendit ces mots, plus chuchotés sur le mode de la confidence que proclamés : - Ne les écoutez pas ceux qui le disent et le répètent ! [...] On m'a fait dire qu'on ne pourrait plus commencer un roman par "la marquise sortit à cinq heures". [...] j'avoue que j'ai été agacé de lire dans le Premier Manifeste du surréalisme que Breton m'avait attribué cette affirmation dont personne, au demeurant, n'a jamais pu vérifier la véracité. J'ai beau être le fantôme de moi-même, je sais encore ce que je dis et me souviens parfaitement de ce que je n'ai pas écrit. Malgré mon grand âge, le mécanisme de mon cerveau n'est pas grippé au point de ne plus pouvoir fonctionner. - Puis-je savoir qui vous êtes monsieur ? demanda Paul. - Je m'appelle Paul Valéry. Mettons. " Pourquoi notre narrateur décide-t-il de partager le destin de cet homme rencontré une fin d'après-midi ? C'est en dénouant le mystère des Cinq heures du soir qu'il résoudra celui de l'étrange Monsieur V, l'inconnu de la Bibliothèque nationale qui disait se nommer Paul Valéry, poète et académicien mort en 1945, " donc physiologiquement inapte à discuter sur un pont enjambant la Seine dans ces années du XXe siècle finissant. »
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vendredi 20 novembre 2009
Hasard ?
Donnant un coup de plumeau sur les rayons de la bibliothèque, une nouvelle étape des travaux de rénovation de l'appartement s'accompagnant d'un inévitable nuage de poussière, il n'y a pas que l'homme qui est poussière, je constatai bien du désordre à la lettre M. Malraux, Millet, Modiano, Musil tous confondus.
Modiano. Je les ai, romans, tous, et décidai donc, la poussière retombée, de les placer en ordre de publication. Quatrième de couverture, quelques pages feuilletées, lecture des critiques ou interviews découpées dans des journaux ou magazines lors de leur publication. Les ai-je tous lus ? Pour les années récentes, aucun doute, mais avant ? Peut-être pas : aucun souvenir de Rue des boutiques obscures, son Goncourt.
Modiano, c'est aussi le temps. L'Occupation, un « musique » -- inévitable cliché, comme pour la Sagan. Or, ne suis-je pas avec Leiris plongé dans un travail sur le temps ? Et un formidable style ? Comme j'aurai terminé Biffures sous quelques jours, je décide de reprendre Modiano depuis le début. Mais ne suis-je pas un habitué des résolutions oubliées, de la procrastination ?
Quelques jours plus tard, revenant de faire quelques emplettes, je m'arrête pile devant la vitrine de la Maison de la Presse : la une du dernier numéro du Magazine littéraire consacre sa une à Modiano. J'achète et, toute affaire cessante, entre au café. Tout un cahier spécial sur mon deuxième auteur favori, après Proust. Petit bonheur.
Bonheur augmenté par les références que je trouve au fil de ces pages, notamment à une page web, fort bien documentée, je le découvrirai plus tard, et à quelques essais récemment publiés. Voilà de quoi me conforter dans ma résolution.
La plupart des articles lus et revenu à la maison, il faut bien y revenir, je plonge dans le site Modiano, et trouve un lien qui ouvre l'émission Un siècle d'écrivains, archivée sur YouTube. Une autre heure de bonheur.
J'aurai donc une fin novembre Modiano...
mardi 17 novembre 2009
Bifur - Biffures
Le mot « bifur » n'est pas attesté dans les dictionnaires. C'est sur des panneaux des chemins de fer que Leiris a vu cette abréviation de « bifurcation ». Leiris l'utilise en parallèle avec biffures pour expliquer sa démarche autobiographique. Bifur vise l'action de dévier que fait la pensée « emportée par les rails du langage » et biffures le travail « d'éliminations successives de valeurs illusoires » de sa vie. Pour faire une œuvre.
Bifur : hier soir, je bavardai -- clavardai -- avec un jeune dramaturge qui m'invita à assister à une représentation de sa prochaine pièce en janvier. Dramaturge, comédien, metteur en scène et romancier. Je le flattai en évoquant, avec un certain sourire, Cocteau. Biffures : le contexte de notre conversation virtuelle. Bifur : apprenant le sujet de la pièce -- la perte de la voix d'un chanteur à la mue -- j'évoquai Pascal Quignard, dont je me rappelai qu'il avait traité de la question. Corneau et Quignard, Tous les matins du monde. Biffures : ce que je fais pendant et après la conversation, le chat incessant en ligne, comme une ivresse mâle. Bifur : je trouve le livre dans ma bibliothèque, La leçon de musique; je feuillette, et trouve de très belles pages. L'auteur, à ma question de la source de son inspiration, me répond qu'il s'agit pour l'essentiel d'auto-fiction. Biffures : le jour même, dans un article du Magazine littéraire sur Patrick Modiano, quelques mots sur la pratique de ce genre. Sévère. Modiano, ou la mémoire. Bifur : ce matin, à l'émission Les nouveaux chemins de la connaissance, le sujet : le temps.
Ceci est un exercice. Pourrai-je écrire ainsi ? Il faudrait travailler. Et du temps.
vendredi 13 novembre 2009
Lire comme Barak : Netherland
Que penser de ce roman ? L'histoire court de septembre 2001, tout juste après la destruction des tours du Word Trade Center, jusqu'à nos jours, le héros,Hans, néerlandais, passant des Pays-Bas à Londres puis à New York pour revenir in fine à Londres. Il y a aussi son épouse, et une séparation qu'il a de la difficulté à vivre, réfugié qu'il est au célèbre Chelsea Hotel. Il y a surtout le personnage de Chuck Ramkissoon, mystérieux trinidadien et grand amateur de cricket, ce non moins mystérieux sport et dont le corps est, au début du roman, repêché des eaux de la rivière Hudson.
Tout cela se lit bien, mais j'avoue que la métaphore de ce sport, si populaire non seulement au Royaume Uni mais encore dans tout le Commonwealth, au point, même, qu'on puisse dire que tous ces peuples de l'ex-Empire britannique, se le seront approprié, et qui aurait été, bien avant le base-ball, version édulcorée de celui-ci, le premier sport des États-Unis originaux, m'a échappé. Et qu'il n'y aurait rien de plus urgent que de l'y réintroduire.
Personnalité hors du commun que ce Chuck, qui semble être le porte-parole de l'auteur, dans un difficile dialogue avec Hans. Activités vraisemblablement maffieuses, et passion du cricket. Amour sans bornes de son pays d'adoption. Et, finalement, j'imagine, une vision des États-Unis par ces nouveaux Américains. Mais quoi ? Voilà, je n'ai pas vraiment compris.
mardi 10 novembre 2009
Lire comme Barak
Joseph O'NEILL, Netherland, Éditions de l'Olivier, traduit de l'anglais par Anne WICKE, Éditions de l'Olivier, Paris, 2009 (297 pages).
Je n'ai décidément pas le blogue constant sollicité ces jours-ci par ce qui agite les médias -- mais ne le sont-ils toujours pas --, et qu'on appelle l'actualité : grippe, mort de Lévi-Straus -- très intéressants podcasts sur France Culture laquelle, il n'y a pas à dire, sait faire, si vous me pardonnez cette tournure -- et, tous y étaient évidemment, la commémoration du vingtième anniversaire de la chute du mur de Berlin. Tout cela, rien que cela. Or, comme il fait très beau depuis quelques jours -- un été des Indiens en novembre ? je me promène beaucoup, profitant du redoux, dans le parc Lafontaine. Le bassin vidé, les feuilles mortes, quelques canards attardés. Je croise souvent la cohorte des mamans à poussette faisant leur gymnastique derrière leur vocifératrice de monitrice : qu'en pensent les marmots ainsi véhiculés ? D'ailleurs j'en venu à penser qu'elles habitent, telles des fantômes diurnes, dans le parc, agitant leur corps puerpéral à la recherche non du repos éternel mais du corps parfait.
Longue digression pour en arriver au roman sur lequel l'Amérique s'est jetée ayant appris que le candidat OBAMA le recommandait, -- après OPRAH, le club OBAMA ? -- que je viens de terminer au soleil ponant et dans la perplexité. Je médite un peu là dessus, et vous reviens.
lundi 2 novembre 2009
Rouge Gueule, d’Étienne LEPAGE, à l’Espace GO
« Un de mes moteurs d'inspiration, c'est la provocation. » Une chance que ce courriel de l'auteur, cité dans le programme de la « pièce » Rouge Gueule d'Étienne Lepage présentée à l'Espace Go, nous renseigne sur son intention, encore que l'objet de cette provocation demeure incertain. Chose certaine, pour moi et mes compagnons, il n'a provoqué qu'un ennui certain, et pour le reste de l'audience quelques gloussements. Pour une provocation, c'est donc raté. Témoin : le bon public montréalais, si prompt d'habitude à bondir de son siège les projecteurs à peine éteints, n'y est allé samedi que d'une demi-ovation. Rassurez-vous bonnes gens, le sang ne coulera pas dans et devant le théâtre : il n'y aura pas une nouvelle bataille d'Hernani rue Saint-Laurent.
Les personnages, petits cols blancs et femmes sapées et entalonnées rue Laurier (genre), nous présentent un catalogue de leurs fantasmes de petits bourgeois bien blancs et bien urbains. On souffre pour les comédiens qui passent de la vocifération au râle en s'agitant beaucoup devant nous pour essayer de les incarner : comment le pourraient-ils ? Ils n'ont rien à dire. Il y a longtemps que le recours à un langage ordurier ou au tout-à-l'égout sexuel ne choque plus – exception faite sans doute de Mlle Bombardier – en cette époque où, comme l'a signalé naguère, Michel Foucault, le sexe est partout affiché. Ce n'est pas la répétition à l'infini du mot « sodomie » ou de l'expression « fuck you » qui va provoquer la mort de la société de consommation. Si, encore, il y avait passage à l'acte, il y aurait-là une esquisse de provocation ! Mais non : tout cela n'est que « paroles, paroles », comme dans la chanson de Dalida (autre grande provocatrice, c'est bien connu…).
S'agissant de provocateurs, n'est pas Baudelaire ou Rimbaud qui veut, mais, pour moi, je provoquerais bien l'auteur à visiter, par exemple, Céline, expert ès provocations s'il en est, et à inventer une langue au lieu de nous ressasser ces petites injures et vulgarités et de se draper dans une pseudo marginalité toute adolescente. Il aurait pu, ainsi, créer une œuvre. Sans doute est-il plus facile pour lui de solliciter la gloire médiatique en singeant le mimétisme ambiant – à l'évidence, au vu de la critique, il a réussi – que d'écrire.
J'espère bien, sans grande illusion, provoquer sa réflexion, mais en conclusion, samedi, ce ne fut pas le Grand Soir, tout juste une bien petite soirée.