jeudi 23 décembre 2010

Citations

Dans la foulée de mon article du 1er décembre dernier sur Une saison avec Bernard Frank, je m'étais constitué un petit florilège que je ne puis m'empêcher de vous offrir et qui vous donnera une idée de son style et de sa verve. Pourrait-on dire qu'il y a en lui un moraliste qui sommeille ? On ne peut lui dénier en outre un talent de portraitiste, quiconque connaît Jean DANIEL ne pourra manquer de sourire à la lecture du commentaire de FRANK sur la fameuse émission d'Apostrophes.
 « En échappant à Paris... j'ai évité les aigreurs de la quarantaine, maladie typique de l'écrivain qui n'a pas franchi les petits tirages de sa jeunesse et qui voit arriver au galop une flopée d'écrivaillons qui seraient bien capables, les bougres, de lui dévorer au passage sa maigre pitance. »

« Il y a la littérature et les femmes, dans cet ordre. J'ai tout le temps vécu entre ces deux pôle : la littérature pour avoir les femmes et les femmes pour avoir la littérature. Je crois qu'on est plutôt choisi par les femmes mais on se donne l'illusion, surtout un écrivain. »

« La vraie littérature, les écrivains morts sont notre refuge, notre paix intérieure, notre prière du soir qui nous console de la petitesse de nos contemporains. Ma vraie nature, c'est l'étude des grands écrivains morts... Le contemporain est en critique le sujet le plus aride, le plus ingrat qui soit. Je ne vous en conseille pas la culture. »

« Du xérès : Les Français le boudent mais c'est l'un des meilleurs vins du monde. Stendhal n'avait pas tord de maudire notre vanité bourgeoise. Les Anglais, qui ne peuvent rien faire comme tout le monde, ont ridiculisé le xérès en le baptisant sherry : comme s'il s'agissait de leurs toutous ou de leurs bonnes femmes ! Voilà un vin noble par excellence réduit à l'état d'esclavage. »

« Les maris trompés ignorent leur bonheur. Ils sont peut-être trompés, mais ils restent des maris. Un amant n'a pas ce refuge, s'il est trompé, il n'est plus rien. »

« Il faut avoir entendu Jean Daniel interroger Soljenitsyne pour comprendre dans leurs beautés les tourments de l'anticommunisme noble. Quand Jean Daniel admire, il importe que l'objet de son admiration se le tienne pour dit et ne s'avise pas de les compromettre, lui et son journal par des fantaisies de langage intempestives. Autrement dit, lorsque quelqu'un de l'importance de Jean Daniel et sur les épaules de qui reposent tant d'espoir, tant de responsabilités -- car cela ne va pas toujours seul à l'intérieur d'une rédaction --, il en veut pour son argent. »

« Comme toute personne qui écrit, Modiano a un grain. Un grain rusé. Un grain fragile. Pourvu que ça dure ! Modiano a l'air tellement triste qu'on lui a accordé le talent sans confession. Drieu s'est suicidé. Nimier s'est tué en voiture, nous avions besoin d'un jeune homme qui passe. »

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