mercredi 31 octobre 2007

Histoire de lecture - 3


Roman narré à quatre voix, un quatuor à cordes, où l'on reconnaît dans chacun des protagonistes le timbre des deux violons, de l'alto et du violoncelle.

Pas de nostalgie, sentiment que, par cliché, ou paresse intellectuelle, on attribue généralement à Modiano; la constatation du « ce n'est plus comme ça maintenant » tenant davantage du repère temporel que du regret passéiste.

Au quatrième mouvement, on rencontre Roland. On le connaît, on le reconnaît. Inventeur d'un Paris aux zones neutres :
Il existait à Paris des zones intermédiaires, des no man's land où l'on était à la lisière de tout, en transit, ou même en suspens. On y jouissait d'une certaine immunité.
Écrivain en quête d'écriture, possesseur d'une seule première phrase :
Les zones neutres ont au moins cet avantage : elles ne sont qu'un point de départ et on les quitte, un jour ou l'autre.
Courage, le roman arrivera bien, Roland. En attendant, il faut marcher, avec Louki, avec sa part d'ombre, passant d'une zone neutre à l'autre, souvent du côté de l'ombre, justement. Comme il y en a de l'ombre dans ce roman. Et des écrivains, et des livres. Et même La philosophie de l'Éternel Retour du même. Des compagnons des mauvais jours.

Bien des années plus tard, un visage connu à la vitre d'une automobile. Ancien fantôme matérialisé pour quelques heures. La mémoire se met à l'oeuvre. C'était en novembre. Pas de lettre. La fenêtre s'ouvre. Un envol, deux phrases et de la légèreté : « Ça y est. Laisse-toi aller. » Mais comment échapper à la gravité de tout.

À peine lu, déjà relu, et à relire encore. Oui, Modiano atteint à l'essentiel, la légèreté des mots, la gravité de la vie. On entendrait Ferré Avec le temps, va tout s'en va. Nous, il nous restera le café de la jeunesse perdue.

La puissance de la littérature.

mardi 30 octobre 2007

Archives : Jacques RÉDA - Patrick MODIANO

En ce temps-là, entre naguère et jadis, c'était à la radio que je bavardais des livres que j'aimais (ou que je n'aimais pas). Je transcrivais mes notes, après les avoir étoffées, puis les versait dans ce qu'on appelait alors un webzine. Temps révolus. La lecture du dernier Modiano m'a poussé à retrouvé ce que j'avais dit de ses ouvrages précédents. À l'époque j'avais tendance à jumeler les titres :

Faisons usage de la métaphore culinaire et, les mots à la bouche, attaquons ce repas, avec en hors d'oeuvre, les récits vagabonds de Jacques RÉDA et, comme plat de résistance (période chère à l'auteur pour qui le connaît) le plus récent roman de Patrick MODIANO.
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Jacques RÉDA, Accidents de la circulation, Gallimard, Paris, 2001 (180 pages)

On peut aborder un lieu le nez dans le Michelin, le Bleu ou quelque autre Fodor et l'œil sur l'objectif et ressentir, là où on l'indique l'étoile dans une prose plate et sin gas, l'émerveillement devant tel site ou monument : c'est ainsi que se fait le tourisme. Pas le voyage, ni la promenade.

Il est, selon moi, préférable de le découvrir avec un ouvrage semblable à celui-ci, rédigé par un promeneur à la longue vocation qui, par la suavité et l'humour qu'il instille à chacune de ses pages, vous mettra l'eau à l'œil de joie et de hâte d'y être déjà, même si vous n'y allez jamais.

Il n'est pas interdit de prendre ce recueil avec soi et, quittant les quartiers trop bien famés, d'arpenter des rues moins glorieuses, mais de celles où l'on vit, que ce soit un garagiste qui juge depuis le bar d'en face si le client vaut le dérangement, un pêcheur qui taquine le temps ou la bourgeoise qui chanelise toute la rue : voilà le vrai dépaysement.

On pourra, comme je l'ai fait pour les expéditions parisiennes, accompagner l'auteur un plan de la ville et un crayon en main : c'est comme si j'avais été un passager clandestin, mieux, un petit oiseau voletant avec discrétion au-dessus de son épaule.

Par ailleurs, on y apprendra comment faire discrètement la table-ronde buissonnière, ce qui dans la capitale nationale peut, appliqué aux innombrables séminaires, retraites et autres colloques, nous sauver sinon la vie, du moins un temps précieux.

Une phrase, sorte de maxime séparée en quatre segments, introduit pour le premier les récits de Paris ; le deuxième, les récits de la banlieue ; le troisième, ceux de l'Île-de-France ; et le quatrième, ceux de Lisbonne, de Lausanne, de Madrid et de San G. en Italie.

Quand on sent que le temps va tourner à l'orage,... Il vaut mieux s'aviser de prendre un peu de champ,
Puis reprendre la route, en roulant, en marchant,... En se laissant porter au loin comme un nuage.

Il ne me reste plus qu'à vous souhaiter bon voyage, c'est à dire : bonne lecture.
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Patrick MODIANO, La petite Bijou, Gallimard, Paris, 2001 (154 pages)

Nous sommes en 1967. La dame dans la cinquantaine porte un manteau jaune quand elle passe à la station Châtelet et que vous, Thérèse Cardères, que l'on appelait quand vous aviez sept ans « la Petite Bijou », l'apercevez, dans la foule. Jaune, mais la couleur comme fanée.

Vous la suivez, c'est si facile de suivre quelqu'un dans le métro à Paris, dans la foule. Car il s'agit peut-être de votre mère, que vous croyiez morte. Il n'y a pas si longtemps, une douzaine d'années peut-être, bref : toute une vie.

Elle habite, près de Vincennes, une banlieue pauvre et triste, s'arrête au café le temps d'un kir, on la surnomme « Trompe-la-mort », autrefois on la surnommait « la Boche » quelle ironie pour vous qui la croyiez morte au Maroc. Il y a si longtemps, une douzaine d'années peut-être. Il est loin le temps du Bois de Boulogne de votre enfance, le grand appartement vide de la rue de Malakoff et puis le petit chien, un caniche noir, qui s'y est perdu quand elle l'a promené.

Un chien. Un caniche noir. Dès le début, il a dormi dans ma chambre. Ma mère ne s'occupait jamais de lui, et d'ailleurs, quand j'y pense aujourd'hui, elle aurait été incapable de s'occuper d'un chien, pas plus que d'un enfant. [...] Dans ma chambre j'avais peur d'éteindre la lumière. J'avais perdu l'habitude d'être seule, la nuit, depuis que ce chien dormait avec moi. [...] Ce jour-là, ma mère est allée à une soirée et je me souviens encore de la robe qu'elle portait avant de partir. Une robe bleue avec un voile. Cette robe est longtemps revenue dans mes cauchemars et toujours un squelette la portait. [...] J'ai laissé la lumière toute la nuit et les autres nuits. La peur ne m'a plus quittée. Je me disais qu'après le chien viendrait mon tour.

En 1967, seule à Paris, à presque vingt ans, vivant de petits travaux à mi-temps, vous voilà confrontée à un passé dérobé, que vous pensiez enterré au Maroc.

Dérobé, ce passé ? Alors que vous vivez dans le même hôtel, près de la place Blanche où votre mère a vécu un temps, avant d'être connue sous le nom de comtesse Sonia O'Dauyé, elle qui s'appelait Sonia ou Suzanne Cardères, et maintenant Mme Boré. Cet hôtel se trouve d'ailleurs dans la même rue qu'un club de nuit, Le Néant, où elle aurait dansé, votre mère, dans une revue obscure, avant de disparaître ?

D'autres personnages évanescents, les Valadier, Véra et Michel et leur petite fille - oui, une petite fille en dissimule une autre, toujours le passé qui revient comme si... -, la grande maison vide au 70 du boulevard Maurice-Barrès, qui longe le Bois de Boulogne.

Dans le Paris de votre dépression, un regard se pose sur vous ; sans rien vous demander en retour, quelqu'un vous aide, vous écoute, s'inquiète de votre santé et met sa main douce sur votre front pour que vous dormiez, là ,sur votre lit, du côté de l'ombre. Pourtant, ces médicaments qu'on vous a procurés vous les avalez un soir, vous la Petite Bijou, pour vous défaire de ce passé obsédant et toujours élusif, mais vous vous réveillerez néanmoins, parce que, tout compte fait, le caniche noir ne s'est sans doute pas perdu.

Il y a les lieux chez Modiano, un Paris sans couleur sur quoi tranche le jaune d'un manteau usé, mais il aussi le temps, le détail d'une époque : les biscuits Lefèvre-Utile, les annuaires du téléphone, le pneumatique, le métro, le Réseau ; un voyage dans le temps (celui de ma jeunesse, rappelez-vous gens d'ici l'exposition universelle de 1967).

C'est ainsi, votre malheur finira bien par finir, mais, pour nous, pas le plaisir de lire et de relire votre histoire, la Petite Bijou.

lundi 29 octobre 2007

Un pedigree

Je retrouve le commentaire écrit sur le précédent texte de Modiano, lequel a été repris depuis dans la collection Folio.

Patrick MODIANO, Un pedigree, Gallimard, Paris, 2005 (122 pages)

Lors de mon prochain passage à Paris je ferai certainement un crochet par le quai de Conti, attiré cette fois moins par l’Institut et la splendeur baroque du Collège des Quatre-Nations que par une adresse anonyme, le 15, où a vécu, à deux pas des Immortels, Patrick Modiano. L’histoire ira-t-elle jusqu’à apposer sur la façade une de ces plaques du genre « Ici vécut… » ajoutant ainsi un mémento en dur à la renommée littéraire de l’auteur ?

Modiano nous présente cette fois père et mère dans un récit dont la sécheresse pourrait déconcerter le lecteur qui n’est pas habitué à le fréquenter, et qui n’y discernerait pas l’obsédante question, adressée autant à l’un qu’à l’autre, de savoir pourquoi « sans nostalgie mais d’une voix précipitée ». Pourquoi une Flamande d’Anvers rencontra, en ces années troubles, à Paris, un certain Modiano, Albert, Rodolphe, issu d’une famille juive de Toscane établie dans l’Empire ottoman.

De cette question primordiale découlent plusieurs autres que le lecteur trouvera au fil des pages et qui, pour peu qu’il les fasse siennes, car c’est là l’objet essentiel de l’œuvre d’art, justifient le besoin d’écrire, le besoin de créer, en un mot, le besoin d’être. Comme si, par ce travail archéologique sur soi, par l’établissement de son pedigree, Modiano s’arrachait à lui-même, tout en se demandant si l’évocation de ces années mortes en valait la peine, la genèse de sa propre écriture et de son œuvre.

Le père est nommé, pas la mère. Peut-être parce qu’elle vit encore ? Une simple recherche dans Internet nous révèle son nom d’actrice, Louisa C., et sa vie de rôles secondaires, pour l’essentiel à la télé, jusque dans les années 80. Ironie : il existe une autre Louisa C., également actrice, Américaine celle-là, et née en 1977. On peut contacter son agent… L’omission du nom est sans doute révélatrice de la relation entre la mère et le fils. Il est deux fois question de chiens; la première, évoque celui donné à la mère et qui, négligé, se jeta par la fenêtre; la seconde, dans le passage suivant, très dur : « Parfois, comme un chien sans pedigree et qui a été un peu trop livré à lui-même, j’éprouve la tentation puérile d’écrire noir sur blanc et en détail ce qu’elle m’a fait subir, à cause de sa dureté et de son inconséquence. ». On notera que c’est une des plus longues phrases du livre…

J’ai aussi été bouleversé par ces soudains passages au « vous », interpellations du lecteur certes, mais autant de moments où le « je » de l’auteur s’interrompt dans le récit comme pour constater la fusion de ce qui fut et de ce qui est advenu, sorte de Temps retrouvé, dans une angoisse obsédante :

« Et de menus évènements se succèdent et glissent sur vous sans y laisser beaucoup de traces. Vous avez l’impression de ne pas pouvoir vivre encore votre vraie vie, et d’être un passager clandestin. ».

Une seule réponse possible à toutes ces questions : écrire. « Il était temps ».

Citation :

« Un soir, dans l'escalier, mon père m'a dit une phrase que je n'ai pas très bien comprise sur le moment -- l'une des rares confidences qu'il m'ait faites : "On ne doit jamais négliger les petits détails... Moi, malheureusement, j'ai toujours négligé les petits détails..." »

vendredi 26 octobre 2007

Citation

Je me constitue un florilège de citations. Le relisant aujourd'hui, je tombe sur cette question que se pose Jean Daniell, le directeur du Nouvel Observateur :

Alors, soudain, on s’est demandé ce qu’était désormais un État riche. Peut-être, après tout, n’était-ce qu’un État où les pauvres étaient plus délaissés qu’ailleurs ?

Le nouvel Observateur n° 2131 – 8 septembre 2005

Pourrait sans doute inspirer le programme politique de telle girouette nationale...

Michel ONFRAY à Contact

Parfois la télévision sait faire, remercions donc Stéphan Bureau pour cette lumineuse entrevue avec le philosophe hédoniste Michel ONFRAY, dont ceux qui me lisent (ou mieux, me connaissent...) savent que j'essaie de m'inscrire dans sa pensée.
Jouir et faire jouir, sans faire de mal ni à toi ni à personne, voilà le fondement de toute morale. Chamfort

Le lien qui suit vous conduit à la page, sur le site de l'émission, consacrée à Onfray. À voir et à lire.

CONTACT - Les invités - Michel Onfray

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Histoire de lecture - 2


Si le silence qui suit l'écoute de Mozart est encore du Mozart, le temps qui suit la lecture de Modiano est toujours du Modiano.

Je demeure souvent, pour ma part, dans un silencieux saississement devant la beauté de la phrase, et l'effet qu'elle provoque.

Témoin l'incipit :
Des deux entrées du café, elle empruntait toujours la plus étroite, celle qu'on appelait la porte de l'ombre.
Trois éléments, une inversion, pour peu on dirait des alexandrins pour le rythme, l'alternance des « t » et des « l »; tout est dit, la couleur est donnée : le personnage principal, dont le nom ne nous est pas encore révélé, entre par l'ombre. Avec un rien de cruauté puisque entré par la porte de l'ombre, il sortira du roman par la fenêtre.

Témoin encore :
J'étais née en Sologne, mais nous n'y étions jamais retournées. Voilà pourquoi ma mère me répétait souvent : « Nous n'avons plus de charpente...»
Cette phase lue, je n'ai pu poursuivre plus avant, immobilisé au milieu d'un long paragraphe. Plus de charpente ! Une femme seule et son enfant, père inconnu, montées à Paris. Non seulement l'arrachement des racines, l'absence de structure. Points de suspension sur le vide.

Je suis dans la vie Modiano : je pense au film de Truffaut, La nuit américaine, au plan où le réalisateur rêve en noir et blanc. Je regarde le ciel, bleu aujourd'hui et sans nuage, d'automne, mais je suis en noir et blanc.

jeudi 25 octobre 2007

Histoire de lecture -1

Patrick MODIANO, Dans le café de la jeunesse perdue, Gallimard, Paris, octobre 2007

À chaque saison son livre. C'est bien connu.

Ainsi l'été, même si nul ne veut bronzer idiot, ramène les pavés sur le sable, d'histoires sentimentales, le roman de plage ayant remplacé celui dit de gare, forts volumes que traînent dans leur sac les mêmes lecteurs qui se plaignent des longueurs de Proust.

Au mois d'août, soleil ou pas, survient le déluge. C'est le temps des à lire toute affaire cessante, des attention chef-d'oeuvre et autres incontournables coups de coeur.

Puis vient l'automne, chez nous avec ses couleurs et les ultimes douceurs d'un soleil de plus en plus oblique.
Pour moi, l'automne n'a jamais été une saison triste. Les feuilles mortes et les jours de plus en plus courts ne m'ont jamais évoqué la fin de quelque chose mais plutôt une attente de l'avenir... Même quand il pleut.
L'automne est, pour moi, d'autant plus agréable qu'il m'apporte le nouveau Modiano.

Cette année, je me le suis procuré, profitant d'un passage à Paris et d'une grande chance, le jour même de sa sortie, le 4 octobre, alors qu'il lui faudra normalement plusieurs semaines, caprices de la distribution, pour franchir l'Atlantique.
Il y a de l'électricité dans l'air, à Paris, les soirs d'octobre à l'heure où la nuit tombe.
Un Modiano se lit avec un plan de Paris; on se promène dans la ville qu'on y soit ou qu'on qu'on vive aux antipodes. Mais il faut un plan. Or, justement, le mien, je l'ai laissé à Paris, je crois, à la table d'un café. Un café de la rive droite, dans le quartier Beaubourg, où j'habitais. Oubli qui me force à solliciter mes souvenirs du quartier de l'Odéon, celui du Condé, mais d'un quartier qui à la fois à cessé d'exister et est présent, aujourd'hui, sous mes yeux plus que sous mes pas, dans les lignes de Modiano. C'est aussi un Paris que j'aime.

Citation, qu'il est étonnant de trouver en exergue, qui donne le ton au roman. Qui n'a pas, bien qu'agité par un pragmatisme tout nord-américain, passé de lents moments dans un café de la montagne Sainte-Geneviève, à y lire, à y rêver, à regarder des inconnus de passage, se croyant alors parisien de toujours ?
À la moitié du chemin de la vraie vie, nous étions environnés d'une sombre mélancolie, qu'ont exprimée tant de mots railleurs et tristes, dans le café de la jeunesse perdue. Guy Debord

mardi 23 octobre 2007

Dans le café de la jeunesse perdue

Patrick MODIANO, Dans le café de la jeunesse perdue, Gallimard, Paris, octobre 2007

En cours de lecture, commentaire forcément à suivre, En attendant, la note de présentation de l'éditeur :

Mot de l'éditeur
Au début des années 1960, aux balbutiements du futur situationnisme, la bohème littéraire et étudiante se retrouve au « Condé », un café de l’Odéon. Parmi les habitués, les quatre narrateurs du roman : un étudiant des Mines, un ancien des RG, une certaine Youki, alias Jacqueline Delanque, et Roland, jeune apprenti écrivain.
Dans la première séquence, l’étudiant des Mines se souvient de la vie au « Condé » et décrit minutieusement les apparitions de Youki, jeune femme de 22 ans apparemment sans attache, qui lui donne l’impression de vouloir faire « peau neuve ».
Dans la deuxième, Caisley, l’ancien des RG, mène l’enquête : le mari de Youki, Jean-Pierre Choureau, l’a chargé de la retrouver. Il découvre son enfance, aux abords du Moulin-Rouge où travaillait sa mère.
Troisième partie : Youki prend la parole et se souvient de son enfance, de ses fugues, des bars interlopes du XVIIIe… Elle évoque les hommes qui l’ont aimée : Jean-Pierre Choureau, Roland, Guy de Veer l’ésotériste qui lui a fait connaître la figure de « Louise du Néant » à laquelle elle s’identifie.
Dernière partie : Roland se rappelle sa rencontre avec Youki et leur amour. Jeune homme passionné par l’« éternel retour » et qui écrit un essai sur les « zones neutres », il flotte, comme Youki, et croit pouvoir la rejoindre dans ses pensées. Mais elle lui échappe comme à tous les autres… Jusqu’au jour où il apprend, au « Condé », que Youki s’est défenestrée…
À travers le passionnant portrait kaléidoscopique d’une jeune femme à l’enfance déchirée et la peinture précise du Paris des années 1960, Dans le café de la jeunesse perdue laisse une impression tenace de poésie autant que d’insituable malaise. Une sensation étrange, qui prend le lecteur à la gorge.

L'obscénité démocratique

Régis DEBRAY, L'obscénité démocratique, Flammarion, Paris, septembre 2007

Poursuit et amplifie la réflexion sur le théâtre contemporain lancée dans le pamphlet Sur le pont d'Avignon. Commentaire à suivre. En attendant, le résumé et la présentation de l'éditeur :

En résumé


L'obscénité démocratique. Non ce n'est pas la démocratie qui est obscène ! C'est la scène républicaine qu'il faut sauver de l'obscénité, au moment où la politique devient le tout-à-l'ego d'un pays en proie aux tyrannies de l'audimat, de l'émotif et de l'intime.

Mot de l'éditeur

Pour Régis Debray, la scène politique française ressemble fort au théâtre contemporain, qui veut tout montrer, exhibe le sensationnel et oublie le rôle du rideau sur scène pour démarquer les gestes de la représentation et le pouvoir du texte. Le théâtre devient ennuyeux et la politique un show qui n'a pas besoin de mettre en scène son ambition collective. La démocratie bascule dans l'obscénité.

Un roi sans lendemain

Christophe DONNER, Un roi sans lendemain, Grasset, Paris, 2007 (384 pages)

Commentaire à suivre. En attendant, voici la présentation de l'éditeur :

Mot de l'éditeur


Qui a tué l'enfant du Temple ? C'est la question que se pose aussitôt Henri Norden, quand on lui demande d'écrire le scénario d'un film consacré au fils de Marie-Antoinette et de Louis XVI. Principal suspect : Jacques-René Hébert, écrivain favori des sans-culottes et directeur du Père Duchesne, le journal le plus scandaleux et le plus célèbre de la Révolution. A l'heure où l'on pense avoir authentifié le cœur de Louis XVII, le tabou sur le destin de ce " roi sans lendemain " est-il vraiment levé ? La réponse est expiatoire. Si elle n'est pas dans le film de Norden, elle se trouve dans le roman de Donner.

Les Malveillantes

Paul-Éric BLANRUE, Les Malveillantes : Enquête sur le cas Jonathan Littell, Scali, Paris, 2006.

La réponse d'un historien, davantage qu'une analyse littéraire, au roman Les bienveillantes. Critique, certes, mais aide à mieux lire le texte de Littel, mettant ainsi ses points forts comme ses faiblesses.

Cet essai a confirmé mes appréhensions face au roman de Littell, mais il faut prendre garde de confondre oeuvre de fiction et Histoire. Voici la présentation qu'en fait l'éditeur :


Les Bienveillantes de Jonathan Littell est le livre-événement de la rentrée littéraire 2006. Prix Goncourt, le roman a partagé la critique en deux camps : ceux qui parlent de chef-d'oeuvre, de nouveau Guerre et Paix, et ceux qui évoquent la fascination du mal, un livre malsain, une imposture littéraire. Paul-Éric Blanrue, historien spécialisé dans les mystifications, reconstitue la vie énigmatique de Jonathan Littell. Il décrypte le contenu du livre - un véritable jeu intellectuel -, recense les erreurs et explique les raisons du triomphe.


Baisers de cinéma

Éric FOTTORINO, Baisers de cinéma, Gallimard, Paris, 2007 (190 pages)

Commentaire à suivre...

samedi 20 octobre 2007

La vie (horreur) en Célinémascope

Plus sobre, mais avec autant d'acidité dans le propos, que Venise-en-Québec (le séjour londonien lui aura été bénéfique), Olivier Choinière frappe, avec La félicité, en plein dans le mille. Et pour une fois, le texte est servi par une mise en scène sobre et discrète de Sylvain Bélanger -- enfin un metteur en scène qui se met au service du texte, et non l'inverse, et pense au public et non à enfermer celui-ci dans sa tête, comme tel qui encore récemment sévissait à Ottawa.

On passe de l'absurde célinolâtrie, et de ses rituels obligés -- les stades et non plus les églises se remplissent désormais de fidèles -- à l'horreur du fait divers, dont les médias, et, las, nous aussi, font leur miel. Le temps d'une chanson, le temps d'un cri. S'y même l'aliénation du travail et de l'univers carcéral professionnel. Caro, le personnage principal, est-elle vraiment l'oracle de notre monde ? on peut le craindre.

Efficace également la troupe de comédiens, qui arrivent à nous faire oublier l'exigüité de la scène; à signaler le jeu subtil de Muriel Dutil, dont le moindre battement de paupière suggère un monde.

En un mot, une excellente façon de passer, soulignons-le fort économiquement, une soirée à la fois sensible et intelligente.

Merci à La licorne.

Théâtre La Licorne

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samedi 6 octobre 2007

Dans le café de la jeunesse perdue


Patrick MODIANO, Dans le café de la jeunesse perdue, Gallimard, Paris, 2007

Patrick Modiano

Sur cette page, celle que les Éditions Gallimard consacrent au nouveau roman de Patrick Modiano, vous pourrez ententre celui-ci présenter son livre. Entendre Modiano, pour moi, est un plaisir qui s'ajoute à celui de le lire. On sent les déambulations de sa pensée comme on déambule, en le lisant, dans les rues de Paris. Un Paris qui a déjà existé et qui, grâce à lui, existe encore.


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