jeudi 27 mai 2010

La traversée des jours

François BOTT, La traversée des jours : Souvenirs de la République des Lettres (1958-2008), Le cherche-midi, Paris, 2010 (169 pages).



Voici un petit livre pour un demi-siècle d'une vie consacrée à la littérature, beaucoup du côté de l'écriture, François BOTT étant avant tout un journaliste des lettres, fondateur du Magazine littéraire, puis rattaché aux pages littéraires du Monde, qu'il dirige pendant une dizaine d'années. Moins histoire que survol littéraire, et très personnel, amitiés et inimitiés comprises.

Bonheur pour le lecteur d'aujourd'hui, peut-être davantage celui qui a déjà quelques années au compteur, car, maintenant, les choses ont bien changé dans la République des Lettres, le marché sévit partout, mais il s'agit là d'un autre débat. Bonheur car l'auteur tente, au fil de ses souvenirs, de rappeler à la vie -- littéraire s'entend -- des écrivains un peu délaissés : André SUARÈS, Léon WERTH, Henri-Pierre ROCHÉ, André BEUCLER, Emmanuel BOVE, Henri CALET et Paul GADENNE. Le tout sous une plume légère et mélancolique, toujours fine -- je rappelle au passage que BOTT est un excellent nouvelliste : c'est ainsi que l'on croisera aussi bien CIORAN « qui mettait une sorte de fureur dans les souci de la perfection. Cette langue française qu'il avait adoptée, il en usait avec les prévenances d'un amoureux fervent », que SAGAN, « [qui] ressemblait à ses livres et aux titres de ceux-ci...souvent distraite, laissant flotter sur les choses et les gens ce regard, ce sourire un peu désappointés », Mme Du DEFFAND et SARTRE et tant d'autres qui pour être moins connus ne sont pas moins dignes d'intérêt.
« C'était de quoi lire pour l'hiver ou l'été. Qu'importe la saison, la couleur des jours, quand opère la magie de la lecture. Les livres m'ont toujours consolé de presque tout le reste. »
La peinture d'une amitié trop tôt rompue par la mort : « Avec lui aussi, le café matinal était un rituel. Nous aurions dû ressentir davantage la précarité de ces entractes, de ces moments volés. Nous sommes toujours ingrats avec le temps qui passe.

Qu'écrire d'autre ? Allez traverser -- avec lenteur -- les jours.

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