dimanche 13 mai 2012

Durassique Parc

Marguerite DURAS, Les Impudents, in Œuvres complètes, vol. 1, Bibliothèque de la Pléiade - Gallimard, Paris, 2011. Première édition chez Plon en 1943, édition en poche chez Folio - Gallimard.
L'on me pardonnera la facilité de ce calembour -- « fiente de l'esprit qui vole », il est encore tôt pour le mien, d'esprit, encore pris dans des brumes matutinales et dominicales. C'est qu'il y a comme de l'archéologie dans ce tout premier roman de M. D., mais, à dire le vrai, pas à mon avis grand intérêt.

On le sait, la Pléiade constitue un monument pour tout auteur qui y figure; et si pour le lecteur, la visite doit bien commencer quelque part, ce ne sera pas, avec ce livre, dans les grands salons donnant sur le parc, mais dans les fondations. Il y découvrira les pierres qui constitueront le socle de l'œuvre à venir : une mère injuste, un frère ainé veule et incapable, une jeune femme qui veut échapper à sa famille recomposée, un amant, une propriété à sauver -- comme dans Un barrage contre le Pacifique et L'amant notamment. Pas d'amour. Comme il s'agit d'un roman bourgeois : de l'argent, l'obsession de l'argent, lequel n'est pas que le nerf de la guerre, mais aussi de la famille. Chose étrange d'ailleurs que cette famille reconstituée : la mère Marie, veuve Grand, devenue par son second mariage Taneran; les enfants des deux lits vivant ensemble; pas beaucoup de père, le premier mort, le second fantomatique. Certains commentateurs y ont vu un monde à la François Mauriac, celui de Thérèse Desquéroux, mais rural plus que provincial. Quoiqu'il en soit, le lecteur ne sera pas mécontent de sortir de la crypte...

Que nous en dit-elle, M. D. ?
« En 1943, j'avais un roman de bout en bout, ça s'appelait Les Impudents. C'était très mauvais, mais, enfin, il était là ce roman. Je ne l'ai jamais relu. Ce qui est écrit est fait, je ne le relis jamais. Personne n'a voulu de ce roman. Chez Denoël on m'a dit : "Vous aurez beau faire, vous ne serez jamais un écrivain." Et puis Plon l'a pris... Comme tout le monde j'avais écrit ce roman pour me décharger d'une adolescence que l'on croit toujours singulière, chargée d'une signification unique -- ce qu'on peut être bête ! Lorsqu'on commence à écrire, il faudrait mettre son premier roman au tiroir. J'avais vingt-quatre ans et j'étais très niaise. [...] »
Niaise, mais point sotte la dame.

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